III - Congrès des Français d'Algérie à Perpignan : Discours du ministre /Message du président Sarkozy
Extraits du discours du ministre de la Défense et des Anciens Combattants, Gérard Longuet, venu inaugurer le Centre de Documentation des Français d'Algérie à Perpignan. Ce discours est suivi du message du Président de la République, Nicolas Sarkozy, adressé aux Français d'Algérie.(29 janvier 2012)
Ci-dessous vidéo sur l'arrivée "en fanfare"du ministre de la Défense
Discours du ministre de la Défense (extraits)
Le ministre rend d’abord hommage au maire de Perpignan qui sut accueillir les Français d’Algérie à leur arrivée en France « non seulement rejetés par l’abandon des paroles et des engagements mais par la fermeture du cœur au moment où ils avaient besoin de chaleur. »
Puis il rappelle son action en faveur d’une harka alors qu’il était jeune sous-préfet à Amiens et sa rencontre avec les principaux responsables des rapatriés, quand il était chef de cabinet du Secrétaire d’Etat chargé des Rapatriés, Jacques Dominati : (Citant notamment Guy Forsy et Jacques Roseau) « Ils représentent pour moi une passerelle avec l’ensemble de vos responsables, ceux dont les noms m’étaient familiers lorsque j’étais jeune et qui avaient accompagné comme vous à la fois mes espérances et mes convictions. »
Ce rappel étant fait, le ministre dit alors son projet d’’avenir. Evoquant son origine lorraine il en vient au rapprochement franco-allemand : « Et cette épreuve là, nous l’avons retrouvée et nous l’avons surmontée. C’est le geste du Chancelier Adenaeur et du Général De Gaulle … » (Sifflements dans la salle sur ce dernier nom) … « Je sais … J’y reviendrai … » (réactions de la salle). « Comment diable se fait-il que nous ne puissions pas, des deux côtés de la Méditerranée, c’est ce que je voulais évoquer, alors que 50 années se sont écoulées, établir des projets et des liens d’avenir alors que nous avons tant apporté des deux côtés de la Méditerranée, et que je vois même le cinquantenaire s’organiser dans une sorte d’indifférence mutuelle alors que j’aurais aimé et même rêvé que l’on puisse se parler et se retrouver pour faire ensemble …(réactions de la salle)….Manifestement, à cet instant, cela n’est pas possible, je le comprends. »
Le ministre en vient au Centre de Documentation qu’il est venu soutenir et reconnaître officiellement. C’est pour lui l’occasion de saluer « cette formidable entreprise que fut celle de la présence française en Algérie. » (applaudissements).
Il regrette l’ignorance de cette histoire par les métropolitains et souligne l’impérieuse nécessité « d’un travail de construction pour que notre pays s’enrichisse de l’aventure qui a été la vôtre et qui a ennobli notre pays.»
Ainsi, ne peut-il manquer d’évoquer en premier lieu la blessure de l’engagement non tenu : « Quand la parole de la France s’exprime, elle doit être respectée et je le reconnais, elle n’a pas été respectée. » (applaudissements).
Il rappelle ensuite la création de l’Algérie, la diversité des populations qui l’ont composée et les épreuves qu’elles ont dû surmonter : « L’Algérie n’était pas un pays de cocagne et ils ont dû travailler dur. C’est une fierté que nos compatriotes de métropole doivent partager. » (dans la salle : "merci" – applaudissements).
Il tient également à souligner l’injustice que représente l’oubli des jeunes appelés « qui durent lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes », tout comme celui du lourd tribut que payèrent les Français d’Algérie lors des deux guerres mondiales.
Il encourage à le faire savoir (réactions de la salle …"Oui, il serait temps et que fait l’Etat ? Les médias ?")
Après avoir affirmé que « le 19 mars ne peut en aucun cas être une commémoration nationale de la tragédie algérienne », le ministre de la Défense et des Anciens Combattants conclut en se proposant « d’ être le partenaire d’une construction vraie de la mémoire française en Algérie, tournée non pas seulement vers vous-mêmes, non pas seulement vers vos enfants et petits-enfants qui ont le droit d’être fiers de leurs grands-parents, mais tournée vers notre métropole toute entière » afin qu’elle ne soit pas accaparée « par les professionnels de la repentance et qu’ils ne puissent se venger sur les réalités d’une réussite, celle de la présence française en Algérie. »
Message du président de la République
(Quelques réactions : "récupération électorale". "chut, chut" : la salle demande le silence)
« Mes chers compatriotes, mes chers amis, j’aurais aimé être parmi vous ce matin (…) Les circonstances m’en ont empêché. La crise grave qui frappe notre pays comme l’ensemble des pays européens me contraint à préparer et à mettre en place sans attendre les mesures énergiques pour y faire face. Vous comprendrez, j’en suis sûr, que je ne pouvais quitter Paris aujourd’hui, mais soyons-en assurés notre rendez-vous n’est que différé.
J’aurais voulu vous affirmer, à vous, dont la plupart se trouvaient à Toulon, il y a cinq ans, le 7 février 2007, que je ne changerai pas un mot, pas une virgule de ce que je vous avais dit alors.
Je m’étais engagé auprès des rapatriés à tout faire pour que soit rétablie la vérité sur leur histoire et que cette histoire l’oubli ne vienne jamais l’ensevelir.
- Vous le savez, je me suis toujours opposé à toute forme de repentance. Les hommes et les femmes qui sont partis s’installer en Afrique du Nord pour y travailler et fonder des foyers, loin d’être frappés d’opprobre méritent notre reconnaissance, en développant l’économie de ces nouveaux territoires. Ils ont œuvré à la grandeur de la France.(…).
- Leur mérite, je le connais, et j’ai toujours veillé à mener une politique qui en soit respectée en demandant notamment à la Mission Interministérielle aux Rapatriés de rester en permanence à l’écoute des grandes associations nationales.
- La loi du 23 février 2005, voulue par un gouvernement auquel je participais, si décriée par les adeptes de la repentance, a permis de prendre en compte les attentes justes exprimées depuis longtemps par les rapatriés. Je puis ainsi vous affirmer que le 5 décembre est, et restera l’unique date de commémoration et d’’hommage de la Nation à tous les enfants tombés pour la France en Afrique du Nord, avant et même après le cessez-le-feu.
- Vous le savez, j’ai voulu, comme vous l’aviez demandé, que les victimes civiles, notamment celles de la rue d’Isly ainsi que tous les Disparus soient justement associées à cette Journée nationale. Vous gardez dans votre chair, vous, rapatriés et harkis, le souvenir douloureux de cette année 1962.
- Je veux que l’ensemble des Français, notamment les plus jeunes, sachent ce qu’ont été les épreuves, l’exil et le déchirement des Français d’Afrique du Nord au moment de leur rapatriement en métropole. Je veux que la mémoire de ceux qui ont dû quitter au prix d’une douleur et d’une souffrance indicibles la terre qui les avait vus naître soit préservée, respectée et défendue. Aussi ai-je attaché beaucoup d’importance à la mise en place de la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie, ainsi qu’à l’ouverture des archives pour que les Français puissent mieux connaître, mieux comprendre la réalité de cette période de notre histoire si souvent déformée par une analyse sommaire, sectaire des événements qui l’ont marquée.
Oui, la France a le devoir de reconnaître le courage, la dignité et les sacrifices des rapatriés et d’honorer la mémoire et leur culture.
- C’est dans cette volonté de ne pas laisser insulter l’histoire, que s’inscrit la proposition de loi présentée par le sénateur Raymond Couderc, adoptée à l’unanimité par le Sénat, visant à sanctionner pénalement les injures et les insultes faites à nos compatriotes harkis. C’est à l’Assemblée nationale de se prononcer maintenant ; elle le fera le 13 février prochain.
Vous estimez sûrement que beaucoup reste encore à faire et que toutes ces avancées restent fragiles car rien n’est définitivement acquis si l’on n’y prend garde. J’en suis bien conscient. C’est pourquoi j’aurai toujours cette même volonté de défendre la mémoire de tous les Français rapatriés, qu’ils soient pieds-noirs ou harkis, afin que leur histoire ne soit ni dénaturée, ni oubliée.
J’aurai prochainement l’occasion et le plaisir de vous le dire et de m’adresser à vous, mes chers compatriotes, mes chers amis, lors d’un déplacement dans quelques semaines.
D’ores et déjà, je vous affirme que cette année 2012, cinquantenaire de la fin de la guerre d’Algérie, sera l’année du souvenir et du recueillement et sûrement pas celle de la repentance. (applaudissements suivis du Chant des Africains).
Prochainement : IV - 1ère Table- ronde : "En quoi l'exil a-t-il contribué à forger l'identité des Français d'Algérie ?"
animée par Thierry Rolando, avec Gérard Crespo, docteur en histoire, Marie Muyl, docteur en histoire, Jean-Baptiste Ferracci, ancien reporter à L'Aurore et Jean-Pax Meffret, journaliste, auteur compositeur interprète.
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